In memoriam

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samedi 5 décembre 2009

H?tes

Mon premier h?te couchsurfer d?barque d'Angers, pr?c?d? de sa grande silhouette d?glingu?e, sous la pluie, chaussures tremp?es (et trou?es). J'allume le chauffage et il enl?ve ses chaussettes.

D?couvert le Jardin des Roses de Fourvi?re avec lui, la ville ?tal?e, g?n?reuse, dor?e, ? nos pieds, des techniciens partout dans les pentes, lampes viss?es en bandeau sur la t?te, sp?l?ologues de la nuit qui pr?parent la F?te des Lumi?res.

Et cette tendresse, cette tendresse-l? qui me vient de le voir filer ? toute allure dans la mauvaise direction, courb? sur le guidon de son V?lo'v, frotter ses mains engourdies par le froid, mettre deux paires de chaussettes, passer des doigts r?veurs dans sa tignasse, laisser n?gligemment son flacon de gel douche ? c?t? du mien, et d?voiler, en enlevant son pull, un ventre maigre, un nombril recroquevill?...


Dans quelques instants, c'est une Italienne p?tulante et aux ongles vernis qui sera chez moi, je lui montrerai la ville lumi?res, on marchera beaucoup. Je me sens par avance vivante, vibrante, de cette rencontre ? trois.


15h06
Tendresse.

(...)
D'o? me vient la tendresse ?
Et que puis-je en faire, adolescent
Malicieux, chanteur vagabond,
Aux cils plus longs que longs ?

Marina Tsv?ta??va

vendredi 4 décembre 2009

Ecrire au temps de la grippe

?pid?mie, pand?mie, ?piphanie de Grippe A. Dans La Peste de Camus, les jeunes et les robustes mouraient plus que les vieux malingres. Co?ncidences et ressemblances. Le trouble devient public.

J'imagine : un pays de gripp?s-pestif?r?s. Quarantaine g?n?rale. Couvre-feu. Des patrouilles de militaires et de milices citoyennes dans les rues. Villes fant?mes et papiers gras qui tourbillonnent dans les rues d?sertes.

Les ?crivains n'?crivent plus : le monde leur est refus?, la peur leur est impos?e. Conscience soudaine et tragique de leur d?pendance ? l'autre en tant que force. A ce que l'on ne peut diss?quer que tant que c'est palpitant. L'?criture est un acte, un mouvement absolument contraire ? l'agonie. Petit ? petit, la conscience devient collective, assez pour qu'on s'aper?oive que se joue l? le sort de la litt?rature. Des id?alistes, des pragmatiques, des d?sesp?r?s et des optimistes mesurent leur t?che et d?cident de s'unir.

R?unions clandestines dans des appartements aux rideaux tir?s. Patins de feutre aux pieds. Chuchotements et pupilles dilat?es. Allumer un petit feu de pages au milieu de la glace. Rendre digne l'attente de la fin. S'?vader, litt?ralement. Alors : ?voquer des morts familiers et lus famili?rement, les convoquer ? table, rajouter des couverts, faire de la place. Une juste place. Eux morts d'autre chose, insouciants et infiniment libres dans leur caveau, eux plus vivants que les survivants.

Les silhouettes vo?t?es d?gouttaient vers la rue ? petits pas prudents, absorb?es aussit?t par la courbe ?paisse de la nuit. Nuit d'encre et livre ouvert.