?pid?mie, pand?mie, ?piphanie de Grippe A. Dans La Peste de Camus, les jeunes et les robustes mouraient plus que les vieux malingres. Co?ncidences et ressemblances. Le trouble devient public.

J'imagine : un pays de gripp?s-pestif?r?s. Quarantaine g?n?rale. Couvre-feu. Des patrouilles de militaires et de milices citoyennes dans les rues. Villes fant?mes et papiers gras qui tourbillonnent dans les rues d?sertes.

Les ?crivains n'?crivent plus : le monde leur est refus?, la peur leur est impos?e. Conscience soudaine et tragique de leur d?pendance ? l'autre en tant que force. A ce que l'on ne peut diss?quer que tant que c'est palpitant. L'?criture est un acte, un mouvement absolument contraire ? l'agonie. Petit ? petit, la conscience devient collective, assez pour qu'on s'aper?oive que se joue l? le sort de la litt?rature. Des id?alistes, des pragmatiques, des d?sesp?r?s et des optimistes mesurent leur t?che et d?cident de s'unir.

R?unions clandestines dans des appartements aux rideaux tir?s. Patins de feutre aux pieds. Chuchotements et pupilles dilat?es. Allumer un petit feu de pages au milieu de la glace. Rendre digne l'attente de la fin. S'?vader, litt?ralement. Alors : ?voquer des morts familiers et lus famili?rement, les convoquer ? table, rajouter des couverts, faire de la place. Une juste place. Eux morts d'autre chose, insouciants et infiniment libres dans leur caveau, eux plus vivants que les survivants.

Les silhouettes vo?t?es d?gouttaient vers la rue ? petits pas prudents, absorb?es aussit?t par la courbe ?paisse de la nuit. Nuit d'encre et livre ouvert.